L’aéro met le cap sur la diversification

Alors qu’ils devraient subir une baisse de 40 à 50% de leurs activités en 2020, les sous-traitants aéronautiques basques ont des ressources et misent sur leurs savoir-faire et leur polyvalence pour rebondir. Témoignages.

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Orrialde honetan

« On navigue à vue… ». L’expression est à la mode chez les sous-traitants basques de l’industrie aéronautique. En panne d’altimètre économique depuis le déclenchement de la crise du coronavirus et ses conséquences désastreuses sur le trafic aérien, la filière est suspendue aux orientations des principaux donneurs d’ordre, au premier rang desquels figurent Airbus, Safran, Dassault…

Annoncé le 9 juin par le gouvernement, le plan de soutien à l’aéronautique de 15 milliards d’euros d’aides, d’investissements et de prêts et garanties ne dissipe pas la crainte d’une casse sociale inédite dans le secteur. « On préfère que ces 15 milliards servent à relancer la machine et nous permettent d’obtenir des commandes plutôt que de recevoir des subventions destinées à nous maintenir en vie », affirme Stéphane Azcué, fondateur et patron de l’entreprise Tekniaero, installée sur le site technopolitain de Technocité, à Bayonne. Ce sous-traitant spécialisé dans les pièces élémentaires et les sous-ensembles grâce à son usine de production en tôlerie, mécanique et assemblage, a été stoppé net dans son élan par la pandémie de Covid-19. « Avant la crise, nous étions dans une très bonne dynamique, rappelle le dirigeant, nous avions triplé notre effectif, le chiffre d’affaires était bon. » Contrainte d’avoir recours au chômage partiel, la PME a vu baisser son nombre de collaborateurs, de 38 à 25, en ne renouvelant pas les contrats de ses CDD et intérimaires. 

« Réagir vite et s’adapter »

« On est inquiets mais on reste assez optimistes parce qu’en tant que petite structure, notre force, c’est de réagir vite et s’adapter, assure Stéphane Azcué. Nous n’avons pas peur d’industrialiser des volumes de pièces très importants. Aujourd’hui, nous en sommes à prendre des décisions stratégiques, notamment lisser la charge de travail sur les mois à venir. Et nous n’avons pas attendu le Covid pour penser à nous diversifier. Nous travaillons par exemple avec la société d’ingénierie mécanique Akira Technologies, elle aussi basée à Technocité, sur un projet de banc d’essais. »

A quelques mètres de l’usine de Tekniaero réside un autre acteur incontournable de la filière aéronautique au Pays basque, Compositadour. La plateforme technologique spécialisée dans les matériaux composites et la robotique et sa petite sœur Addimadour, experte en fabrication additive, ne se sont pas totalement arrêtées pendant le confinement grâce à la pratique du télétravail pour bon nombre de leurs 40 salariés. 

« Dans le spatial et la défense »

« En plein confinement, nous avons même décroché un contrat dans l’aéronautique civile avec une commande de Korea Aerospace Industries », se réjouit le directeur de Compositadour Francis Sedeilhan. Si ses prévisions prévoient une baisse de 50% des activités de R&D cette année, l’ingénieur « pense que le soutien annoncé de l’Etat et de l’Europe va passer par des programmes ambitieux sur l’aviation verte. » « Nous avons clairement pris le parti de travailler depuis quelques années sur les thermoplastiques, ajoute-t-il. Nous allons pour cela procéder à une extension de 600 m2 de notre bâtiment. Nous parions également sur le développement de l’hydrogène, pour lequel nous avons un rôle à jouer en matière de stockage. Nous développons par ailleurs les technologies de drapage automatisées, que nous avons réussi à transférer dans l’industrie aéronautique et que nous souhaitons amener vers des PME et vers d’autres secteurs d’activités comme les sports et loisirs, le nautisme… Pour ces investissements et cet effort de diversification, nous bénéficions du soutien de la Communauté d’agglomération Pays Basque. »

Autre poids lourd de la sous-traitance aéronautique, le groupe Lauak enregistre une baisse d’activité de l’ordre de 40 à 50% et a mis en place des mesures d’activité partielle pour une partie de ses 1 800 salariés - 700 travaillent sur les deux sites d’Hasparren - afin d’amortir les effets de crise. Si son « groupe réfléchit à une restructuration », son directeur général Mikel Charritton assure que si sa « stratégie reste résolument tournée vers l’aéronautique, il est bien entendu ouvert à toutes les opportunités de diversification, notamment dans le spatial et la défense, mais c’est un processus qui est long… » 

« Présent dans plusieurs secteurs »

Malgré la crise sans précédent que traverse le secteur aéronautique, à Mauléon, Spi Aéro, filiale du groupe Lopitz spécialisée dans le traitement de surface et la peinture de pièces pour l’aéronautique, est parvenue à maintenir l’ensemble de ses effectifs. « Nous misons sur l’agilité de nos 150 salariés pour nous adapter aux fluctuations des charges de travail et des demandes qui ne cessent d’évoluer », explique son gérant Mathieu Pourrillou, principal actionnaire de Lopitz. « Notre groupe est diversifié, développe-t-il, 40% de nos activités concernent des métiers hors aéronautique, dans lesquelles les carnets de commande sont restés au niveau d’avant l’épidémie de Covid. Notre stratégie familiale consiste ainsi à être présent dans plusieurs secteurs à travers nos autres filiales : la chaudronnerie industrielle pour les secteurs de la pétrochimie et de l’agroalimentaire, la fabrication de serrurerie et métallerie à destination de l’habitat. Nous traversons une période difficile mais nous avons des ressources ! ».

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